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La scène se situe sur un escalier de nuages. Un type a moitié vêtu et à moitié éveillé s’étonne auprès d’un vieux barbu auréolé. Ce pourrait être le mixage d’une pub Ricoré et Nespresso.


-          - C'est quoi ce délire ici ?

 

-          - Ce « délire » ? Tu es mort mon enfant… Mais dis-moi que trimballes-tu sous ton bras ?


Le vieux qui ne perd pas le nord espère se payer un petit café mais le jeune abasourdi est tout tremblant et balbutie :


-         -  Je suis mort ? Mais…, mais j'étais justement dans mon atelier en train de…, de peindre et ce…, ce tableau justement...


- La répétition du mot « justement » est là pour rappeler au spectateur que le peintre est justement mal réveillé et qu’ainsi il répète injustement ce mot alors qu’il fait face à son justement dernier, euh jugement, bref. Le vieux rétorque :

 

-          - Fais-moi voir ça. Tu peins en pyjama toi ?


En réalité il n’est pas en pyjama mais en boxer mais Saint Pierre joue le féru de vocabulaire. Oh ça rime… Bref le jeune s’impatiente :

 

-          - Oui et alors ? Dites-moi plutôt ce que je fous là ?

 

-        -   C’est pourtant simple : ton heure a sonné et il était temps que tu t'en ailles.

 

-          - A 33 ans? J'en ai connu des plus vieux que moi qui…


 Le peintre fait référence à son père qui à 65 ans et est en parfait santé. Le spectateur relèvera l’emploi du Passé Composé par le jeune qui admet progressivement qu’il est mort. Le vieux roule les mécaniques :

 

-          - Tu crois que j'ai quel âge moi ? Je me tape ce job depuis une éternité mon p'tit gars et pas au sens figuré si tu vois ce que je veux dire !

 

-          - J'men tape moi de ton boulot, ce que je veux c'est retourner d'où je viens : dans mon atelier à faire de l'art.

 

-          - De l'art ? Tu parles de ce torchon que tu esquissais en caleçon?


Le spectateur notera l’emploi binaire par Saint Pierre de mot faisant référence au  textile. En effet, il est bien connu que dans la famille Lescieux la lessive ça les connait. Ils sont toujours drapés de blancs éclatants. Le jeune s’énerve :

 

-          - Mais je m'en vais t'en coller une moi ! L'art ne s'explique pas. Tu le comprends ou tu ne le comprends pas mais tu ne peux pas juger ainsi.

 

-          - Je serais toi le jeunot je la bouclerai parce que justement mon travail consiste à juger si tu restes ou pas.

 

-          - Ok ! Ok !  Je taquinais un peu. Qui aime bien…


Un flash éblouit  les spectateurs. En une fraction de seconde le décor des nuages est remplacé par celui d’une chambre. On reconnait le jeune peintre qui dort à moitié dans son  lit à l’arrière-plan. Au premier plan une jeune femme enfilant son soutien-gorge en vitesse vocifère :


-          - ALORS ! ALORS... TU TE REVEILLES MON CHERI ?

 

-         - Hum, oui, oui. Oh ! J'ai fait un rêve de fou. J'étais mort et...

 

-          - Ah ! Enorme en effet. Bon allez faut que je file! Bonne journée !

 

-          - Mais je te racontais…


        - Oui mais j’n’ai pas le temps tu me raconteras ça ce soir. Travaille bien surtout. Tu sais que tu dois finir ce tableau pour mardi.

 

-          - Oui j’y vais de ce pas.

 

-          - Habille-toi peut –être. De loin. Bisou !!!  La porte claque.

 

-          - "Habille-toi ! Habille-toi !" Que ça à faire moi ! S’exclame-t-il à lui-même.


Il s’installe face à son chevalet et attrape son pinceau. Brusquement il le lâche et porte sa main à son épaule gauche comme si une douleur le prenait à la poitrine. Il s’écroule. Le rideau tombe.

Tag(s) : #Dialogues
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